mercredi 19 février 2025

CHRONIQUES DE LA FOSSE : LUCIFERIAN - SUPREME INFERNAL LEGIONS (2006)


Durant mes (pas si lointaines) années de jeunesse où je ne jurais que par les incantations blasphématoires du metal noir, juste après avoir pris en pleine poire la seconde vague de black metal en provenance de Norvège (dont je ressens toujours les effets aujourd'hui, c'est vous dire), je me suis mis à approfondir mes connaissances dans ce domaine tel un jeune sorcier passant ses journées entières dans les couloirs lugubres et poussiéreux de la bibliothèque de Poudlard. C'est durant ces années d'étude de l'art noir que j'ai découvert que le black metal pouvait en fait se décliner à toutes les sauces. Radical, mélodique, symphonique, ambient, atmosphérique, tantôt mélangé avec du death metal, du thrash, du doom ou du rock, le black m'attirait et me désemparait en même temps, au point qu'un jour, je me suis posé cette question qui m'est venue tardivement à l'esprit : comment le black metal doit-il être écouté ? J'imagine que cela est avant tout une question de feeling car, après tout, la musique, sous toutes ses formes, n'est-elle pas avant tout source d'émotion. Néanmoins, en prenant le recul nécessaire, c'est-à-dire en réécoutant attentivement le black metal des débuts, aussi bien celui de la première vague que celui de la deuxième, je me demande finalement si la réponse à cette question ne se trouve pas parmi ces formations d'antan qui ont forgé ce que sont les fondations mêmes du genre. Prenez n'importe quel groupe de black metal du débuts des années 90, ou même ceux des années 80, vous verrez qu'à de très rares exceptions, toutes ces formations ont pour point commun une radicalité des plus extrêmes.

En 2006, Luciferian appliquait cette leçon à la lettre sur son premier album, Supreme Infernal Legions. Formé par le musicien Héctor Carmona en 1996 sur les cendres d'Ominous Sacrifice, le groupe demeura longtemps dans les dédales obscurs de l'underground avant de sortir du bois tel un loup affamé hurlant au clair de lune. Luciferian ne s'embarrassait pas de fioritures sur cet opus inaugural. Tant qu'à faire du black metal bestial et extrême, autant y aller franchement en laissant de côté le superflu. Du blastbeat, en veux-tu, en voilà, avec la guitare en mode scie sauteuse qui va bien et les vocaux démoniaques filant même des frissons d'angoisse à tous les suppôts de Satan. Les légions infernales se mettent en ordre de marche sur les refrains guerriers de The Rising Darkness et Eternal Fire, les créatures le plus viles des cercles inférieurs aiguisent leurs griffes sur Vision of Black Dimensions et Satan's Retaliation, tandis qu'une lune glaciale éclaire de sa lumière blafarde les champs de batailles jonchés de cadavres sur le pestilentiel Triumphant Existence of the Eternity.

Je fais ici un descriptif volontairement imagé justement pour montrer ce que cet album peut faire naître comme sentiment une fois l'écoute lancée. Vous aurez bien entendu compris que, d'un point de vue purement musical, c'est toute la radicalité du black metal old school qui s'exprime pleinement sur ce disque rageur avec, évidemment, ce petit côté cradingue et malsain qui fait la particularité de l'école sud-américaine, Luciferian étant originaire de Colombie, Armenia pour être précis, ville située entre Cali et Medellin. En conclusion, si le black metal sous son aspect  le plus brut, le plus cru, est le seul à trouver grâce à vos yeux, et si par la même occasion vous ne craignez pas de vous faire ramoner les conduits auditifs en profondeur, Supreme Infernal Legions ne peut se situer que dans votre créneau.

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