Une statue. Voici ce qu'il faudrait ériger en l'honneur d'Eternal Dirge pour avoir été pendant dix ans un des fleurons du death metal allemand et même européen. Dix ans de carrière seulement, de 1986 à 1996 mais, quelle carrière, dont l'apogée fut atteinte en 1992 lorsque parut sur Hass Produktion le premier opus de la formation, Morbus Ascendit.
L'album était intéressant à plus d'un titre. Véritable pamphlet socio-politique qui n'hésitait pas à attaquer frontalement ceux qui profitent du système, il était non seulement une œuvre à la production impeccable mais aussi, un témoignage discographique puissant qui montrait à quel point le death et le thrash pouvait avoir des atomes crochus. L'exercice de style était poussé jusqu'à son paroxysme, et ce dès les premières minutes d'écoute. Avec une facilité parfois déconcertante, les allemands testaient toutes les possibilités de la créativité musicale en alternant le rythme. Furieusement thrash sur les énergiques Out of the Aeons et The Crawling Chaos, parfaitement équilibré entre death et thrash sur des bijoux d'orfèvrerie comme Exploring the Depths ou We Are the Dead, le groupe était tellement maître de son art qu'il pouvait même se permettre quelques surprenantes digressions sur des compositions plus aventureuses et plus expérimentales, pénétrant sur un terrain death thrash progressif sur Blind Idiot God, tandis que des trésors de technicité venaient se faufiler avec audace dans les cassures de rythme de Sinusitis Maxillaris. Porté par des guitares surpuissantes, un son de basse généreux et une batterie survoltée, Timo Knoff, qui décédera subitement en août 2018, n'avait plus qu'à poser sa voix de stentor pour achever les derniers résistants. Très revendicatif, l'album s'achevait alors par une sentence irrévocable sur l'hymne thrash Evolved Mutations : "Tomorrow is worthless // We are already dead".
Cette strophe était sans doute annonciatrice du désastre à venir puisqu'à l'issue d'une tournée avec Cannibal Corpse en 1996, Eternal Dirge se sépara, non sans avoir sorti un ultime album, Khaos Magick, la même année. Ne restent que les souvenirs et la période glorieuse d'un groupe qui aura tutoyé les sommets grâce à son style inimitable. Tout amateur de death metal old school se doit de posséder un exemplaire de Morbus Ascendit dans sa discothèque.

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