dimanche 2 février 2025

LE CULTE DE L'UNDERGOUND : CES ALBUMS DE DEATH METAL PARMI LES PLUS BRUTAUX ET OUTRAGEANTS DES ANNÉES 90 (PARTIE 2 : 1993-95)


Nous poursuivons la mini-série entamée il y a quelques jours avec une seconde partie dans laquelle nous allons cette fois-ci nous intéresser à des albums de death metal parus durant la période allant de 1993 à 1995, en pleine apogée du genre. Ravage Cérébral a sélectionné dix opus susceptibles de sortir du lot.

Electrocution - Inside the Unreal (Contempo Records, 1993) :


Composé à l'époque d'un solide lineup au sein duquel évoluait deux frères, Max et Luca Canali, respectivement bassiste et batteur, ce groupe originaire de Bologne, où il fut fondé en 1990, s'imposa dès ce premier album comme une des valeurs sûres du metal extrême transalpin. Mick Montaguti, toujours actif de nos jours après une reformation en 2012 à l'aide d'un lineup remodelé, assurait un chant dantesque qui pouvait parfois le rapprocher d'un David Vincent ou Steve Tucker (Morbid Angel), ou pourquoi pas de Mike van Maastrigt (Sinister), tandis que la section rythmique envoyait des riffs ciselés et soutenus, typés à la Morbid Angel (forcément) et même le Sepultura des années 80. La production très franche constituait la cerise sur le gâteau, offrant à cet opus un rendu très brutal.

Acrostichon - Engraved in Black (Modern Primitive, 1993) :


Il serait trop réducteur de dire que cet album vaut surtout pour le talent de sa chanteuse et bassiste Corinne van den Brand. Certes, l'artiste était à l'époque une des rares voix féminines les plus en vue dans le death metal avec son timbre si particulier. Cependant, cela va beaucoup plus loin sur ce premier opus dont l'aspect brutal s'accompagne d'harmonies sophistiquées et cotonneuses, travaillées dans un souci du détail qui fait de Engraved in Black un ouvrage tortueux, tourmenté et ô combien à part. C'est une façon, en quelque sorte, de découvrir la brutalité sous un angle différent. Une expérience d'écoute inédite qui en scotcha plus d'un dans les années 90.

Demilich - Nespithe (Necropolis Records, 1993) :


Le seul album des finlandais était un remarquable exercice de style totalement décomplexé, là la fois technique, abstrait et très avant-gardiste pour cette période. Bien sûr, les vocaux uniques en leur genre d'Antti Boman apportaient beaucoup dans l'aspect brutal de la chose mais, le vocaliste pouvait compter sur une solide instrumentation pour le soutenir, digne d'un régiment de chars d'assaut lancés à votre poursuite. Au-delà du côté malfaisant et embrouillé qui en sortait, cet album était la marque du pur génie, un maelstrom de créativité très rare à égaler, même si durant cette période, d'autres formations finnoises comme Demigod ou Adramelech allaient toucher l'excellence du doigt.

Infester - To the Depths, in Degradation (Moribund Records, 1994) :


Les frontières de la décence étaient largement dépassées sur ce premier et seul opus ravageur et impitoyable du groupe fondé par trois gamins de Seattle en 1991 sous le nom de Threnodist (il deviendra Infester l'année suivante). Il était question sur ce disque de pur death metal puisé dans les profondeurs les plus insalubres, soit l'essence même d'un death d'une rare agressivité, nourri de tous les maux de la société, racisme, viol, misogynie, sans oublier quelques thématiques plus classiques dans l'imagerie du style, telles que le gore et l'occultisme. Le tout formait un ensemble d'une remarquable cohérence malgré la violence extrême, offerte à l'état brut, qui se dégageait des compositions. Impossible de sortir indemne d'une telle expérience musicale.

Gutted - Bleed for Us to Live (Red Light Records, 1994) :


Groupe cruellement sous-estimé qui pondit le 29 mars 1994 ce pur joyau (son premier album) de gros death metal sans artifice, aussi brutal sur le fond que sur la forme, soutenu par une section rythmique de grande qualité et un chant aussi habité que terrifiant. Le combo (composé de trois frères) n'hésitait pas à porter des coups sous la ceinture, en allant loin dans le gore et en attaquant directement la religion. Choquant, dites-vous ? À coup sûr, cet album sans concession l'était.

Asphyx - Asphyx (Century Media Records, 1994) :


C'était la période sacrée, la période bénie des dieux (appelez cela comme vous voulez) du groupe néerlandais, sous l'ère très courte (1992-1994) de Ron van Pol au chant, tout simplement immense sur ce disque, avec le soutien d'Eric Daniels à la guitare et Roel Sanders (God Detroned, Inhume) à la batterie. Un groupe très différent donc, puisque plus aucun n'est dans le lineup aujourd'hui. On sentait la différence sur cet album éponyme par rapport aux deux premiers chapitres cultes qu'étaient The Rack et Last One on Earth. C'était ici le mariage du death et du doom, parfaitement agencé, construit sur de solides fondations, ténébreux, obscur, aux relents occultes, un de ces disques ensorcelés que les enfers mêmes semblent avoir forgé et d'une brutalité primale, telle une voix lugubre s'élevant dans le vide. Une œuvre majeure, parmi les plus terrifiantes parues en 1994.

Autopsy - Shitfun (Peaceville Records, 1995) :


Déjà au sommet de sa gloire après les brûlots incendiaires que constituait le triptyque Severed Survival (1989), Mental Funeral (1991) et Acts of the Unspeakable (1992), Chris Reifert et sa bande de malotrus se disaient sans doute qu'ils n'avaient déjà plus grande chose à prouver. Toujours animé par sa passion pour un death crade, horrifique, nécrophile et jamais dénué d'humour noir, le groupe décide à l'été 1995, année de sa première séparation, d'envoyer mémé valser dans les orties avec ce rare objet d'irrévérence, à la pochette mythique, sans doute composé de chutes de studio qui prenaient la poussière dans les placards. Dans un geste improvisé de je-m'en-foutisme le plus total, véritable insulte aux maisons de disques et même à la terre entière, Autopsy bousculait les codes de la brutalité et de la vulgarité sur ce disque jouissif d'une durée de près d'une heure, crasseux et puant sous les aisselles, telle une flatulence projetée en plein visage, le plus incroyable étant qu'il y avait du génie dans tout ça.

Molested - Blod-draum (Effigy Records, 1995) :


Premier groupe du musicien Øystein Garnes Brun, qui allait plus tard fonder Borknagar, Molested se laissait aller à de surprenantes expérimentations sur ce seul et unique opus dont la brutalité était contenue par une approche assez inédite consistant à concevoir des chemins labyrinthiques pouvant momentanément nous éloigner du death pur et dur. Il en résultait un rendu assez déroutant de prime abord, plutôt d'avant-garde, pourrait-on dire mais, ne perdant rien de son agressivité primale, surtout mise en avant par le chant de ce cher Øystein, déjà très inspiré à l'époque avant que son esprit ne change de direction en 1996. Un drôle d'album, pour sûr, qui n'a rien perdu de son attrait depuis.

Gorelust - Reign of Lunacy (New World Symphony Records, 1995) :


Le groupe québécois n'y allait pas avec le dos de la cuillère sur ce premier opus. L'attaque était frontale, rapide, sanglante, d'une violence livrée à l'état brut sur cet album directement inspiré de la toute première vague du brutal death metal. Toutes les influences venant des précurseurs du genre y passaient, pour être malaxées, passées dans un mixeur et en ressortir sous la forme d'un death bien gras, chirurgical et sincère. C'était au final de la bestialité qui se montrait sous son aspect le plus abject, inhumain et choquant, ce qui fait encore aujourd'hui de cet album un must pour tout amateur du genre.

Internal Bleeding - Voracious Contempt (Pavement Music, 1995) :


Un album culte pour tout amateur de slam/brutal death metal qui se respecte, dans la parfaite continuité de ce qui se pratiquait de plus en plus à l'époque après les grandes épopées de Cannibal Corpse, Avulsed et Napalm Death, pour n'en citer que quelques-uns. Agressif de bout en bout, ne cédant pas la moindre parcelle de terrain, provoquant, dérangeant, le premier opus des gars de Long Island était un hommage non dissimulé à la légendaire scène hardcore de New-York mais également, un pur essai de death primitif conçu par des praticiens qui allaient faire entrer le slam dans la catégorie supérieure. Du très grand art, véritable objet de culte de nos jours.

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