Infatigable travailleur de l'ombre enchaînant les singles à la vitesse de la lumière depuis deux ans (déjà deux albums à son actif), l'artiste multi-facettes Ben Ricketts continue d'alimenter son entité Acid Mass d'un thrash metal dopé à la vieille école. L'homme de Cincinnati n'allait pas refermer 2024 sans nous proposer un dernier cadeau, sous la forme d'un morceau inédit, Violent End, qui ne devrait figurer sur aucun EP, ni album, et que vous pouvez écouter dès à présent. Comme à son habitude, Acid Mass nous fait l'offrande d'un thrash direct qui ne fait pas dans la demi-mesure.
mardi 24 décembre 2024
VIDÉO : DISRUPTED - CHOKE ON THE CROSS
Pour ceux qui auraient manqué l'épisode précédent, Disrupted, excellent groupe de death metal old school suédois, dévoilera son troisième album studio, Stinking Death, le 23 janvier prochain via Trust No One Recordings. En attendant cette date, le combo nous offre un clip lugubre et subversif pour Choke on the Cross, morceau qui ouvre l'opus.
VIDÉO : CELESTIAL SCOURGE - VESSELS
Amateurs de death metal brutal et technique, soyez rassurés, vous aurez droit à votre dose avec plein de bonnes sorties prévues l'année prochaine dans ce secteur. Celestial Scourge sera notamment de la partie puisque les norvégiens dévoileront leur premier album, Observers of the Inevitable, le 28 février chez Time to Kill Records. Un bonheur n'arrivant jamais seul, le morceau Vessels bénéficie d'un traitement vidéo que voici.
lundi 23 décembre 2024
LES ARCHIVES DE LA CRYPTE - ÉPISODE 26
Chaque lundi, Ravage Cérébral explore les profondeurs les plus obscures et malsaines de la scène death metal underground en évoquant la mémoire de groupes disparus, oubliés, ressuscités ou toujours en activité depuis leurs débuts.
Molested - Unborn Woods in Doom (1993) :
Commençons par un peu d'histoire. Fondé à Bergen en 1991, Molested était le premier groupe d'un certain Øystein Garnes Brun qui allait fonder trois ans plus tard Borknagar. Erlend Erichsen, qui fit dans sa carrière un court passage chez Gorgoroth, en était quant à lui le batteur. On était ici loin du black metal de Gorgoroth et encore plus loin des expérimentations viking/folk/black/prog indigestes de Borknagar puisque Molested faisait du death et du très bon, brutal et délétère. Un groupe qui sortait de l'ordinaire, c'est le moins qu'on puisse dire, alors que la Norvège était encore submergée par la vague black metal du début des années 90. Le groupe dévoilait sur cette démo cinq morceaux terrifiants et lourds ne laissant aucune place à la faiblesse.
Immortal Possession - Mass Murder (1994) :
Ce groupe fondé à Winnipeg en 1989 avait un sérieux atout dans sa manche, son chanteur Chris Labossiere, dont les vocaux graves, bas et profonds étaient particulièrement effrayants. Pour le reste, les canadiens envoyaient du gros death lugubre et blasphématoire sur cette troisième démo. Étrangement, ils allaient disparaître de la circulation en 1995 pour finalement se reformer en 2020, à la surprise générale. Ils ont même sorti un album il y a deux ans sur CDN Records avec toujours l'ami Labossiere au chant.
Exorcist - Voices from the Graves (1987) :
Sur cette vieille démo, ce groupe polonais né à Varsovie en 1986 pratiquait du thrash très speed qui, sur certains morceaux, comme Last Priest ou Nun's Sabbath, lorgnait beaucoup vers le black et même un death que l'on pourrait qualifier ici de très primitif. Ces gars ont dû se laisser bercer étant jeune par les rythmiques endiablées de Bulldozer, le vieux Kreator et bien sûr Venom. Une drôle de curiosité.
Antropomorphia - Bowel Mutilation (1992) :
Toujours en activité aujourd'hui malgré une séparation en 1999, ce groupe fondé à Tilburg, aux Pays-Bas, à la fin des années 80, déboulait avec cette démo composée de cinq morceaux ancrés dans un death metal typique de l'époque sur le continent européen et qui n'était pas sans rappeler leurs compatriotes de Gorefest, Asphyx et surtout Sinister, sans oublier Thanatos. Rien de surprenant, tant la scène néerlandaise était en pleine vitalité durant cette période.
Deranged - Place of Torment (1989) :
Ce groupe canadien eut une très courte existence, de 1987 à 1989, soit tout juste le temps de publier deux démos, dont celle-ci, sur laquelle leur thrash metal ultra énergique faisait mouche (les vocaux maniaques de Scott Murdoch, le chanteur !) et alors que le thrash était déjà en plein boum dans leur pays grâce à Sacrifice et Infernäl Mäjesty. Leur destinée fut hélas toute autre.
ANCIENT TOME - LAMENTATION
Avec à son bord deux membres de Civerous, Drew Horton et Aidan Neuner, pas étonnant qu'Ancient Tome ait tout de suite attiré l'attention sur lui depuis sa fondation en 2020 à Los Angeles. Le 20 janvier de l'année prochaine, le groupe californien livrera via Chaos Records son troisième EP, The Implications of Ascendancy, et cela risque d'être du lourd quand on écoute le premier morceau dévoilé, Lamentation, composition massive et écrasante longue de plus de douze minutes, d'un blackened death/doom sombre et glaçant qui se marie idéalement avec la saison hivernale.
BILAN 2024 : DIX MENTIONS HONORABLES D'ALBUMS DEATH METAL
Avant que Ravage Cérébral ne dévoile incessamment sous peu le top 30 de ses albums death metal préférés de l'année 2024 (vous pouvez toujours vous reporter à l'année précédente en attendant), nous débutons le traditionnel bilan de fin d'année par une petite liste, sans ordre particulier, de dix albums de death metal parus entre janvier dernier et ce mois-ci, qui bien que n'étant pas sélectionnés dans le top 30, méritent une attention toute particulière de par les qualités incontestables qu'ils dégagent. Voici donc les dix mentions honorables de Ravage Cérébral pour 2024.
Mortal Wound - The Anus of the World (Dark Descent Records / Me Saco un Ojo Records) :
On attendait beaucoup de ce premier acte de la formation californienne et on n'est pas déçu. Le gore, la putréfaction et les odeurs pestilentielles sont au rendez-vous sur cet opus de pur death metal old school, très vieille école jusque dans sa production et revêtant un caractère assez cinématique en raison des références qui le traversent, venant entre autres du film Apocalypse Now. Un album délicieusement grotesque et gargantuesque à l'atmosphère morbide.
Gutless - High Impact Violence (Me Saco un Ojo Records) :
Un album qui porte bien son titre tant les australiens nous servent ici du death ultra rapide, sur un rythme de maniaque, tel un assaut de blindés écrasant tout sur leur passage. Ce premier opus ne fait aucune concession en étant à la fois old school, brutal et lorgnant parfois vers le grindcore. De la violence sonore à l'état brut que ne reniera pas la pochette suffisamment explicite pour que l'auditeur sache dans quoi il met les pieds.
Ashen Tomb - Ecstatic Death Reign (Everlasting Spew Records) :
Ce groupe finlandais nous inflige une claque magistrale sur ce premier album d'une rare brutalité. L'instrumentation, d'une régularité de métronome, nous secoue sans ménagement, décochant les directs du gauche et du droit jusqu'au K.O. Chaque morceau est une vague qui déferle sans la moindre pitié en ne laissant que la désolation après le reflux. C'est du death sérieux et sincère, superbement exécuté et qui trouve son inspiration du côté d'Incantation et Abhorrence en passant par Morta Skuld. Comme souvent, la Finlande ne nous déçoit pas quand il s'agit de death metal.
Amputate - Abysmal Ascent (Massacre Records) :
Troisième opus de ce groupe expérimenté (avec des membres de Kraanium et Sadistik Warfare) fondé au Portugal puis, délocalisé en Suisse. Nous sommes ici dans du brutal death metal très influencé par la vieille école, puissant, ravageur et bien produit. Chaque morceau s'enchaîne comme autant de pains distribués en pleine poire avec pour objectif principal de provoquer de gros dégâts. Et ça marche. On ressort groggy de ce disque imposant qui n'est pas là pour vous apprendre à faire du tricot.
Sanctuarium - Melted and Decomposed (Me Saco un Ojo Records) :
Second album de ces catalans venant des fins fonds de l'underground à tel point que les égouts de Barcelone ont dû les recracher. Vous n'entendrez sans doute pas plus insalubre et malsain que leur death/doom puant la mort et la putrescence à des kilomètres à la ronde. La basse va vous liquéfier les chairs, la batterie vous fragmenter les os jusqu'à les réduire en poudre, le chant de zombie vous décomposer jusqu'à ce que vous soyez réduits en une bouillie difforme. Bon, vous l'aurez compris, c'est du death/doom produit comme il se doit et comme il devrait toujours l'être.
Emaciated - Death from the Southwest (Indépendant) :
Une bonne surprise, à n'en pas douter, de ce groupe originaire de l'état du Nouveau-Mexique, errant dans l'ombre avant que ce premier album auto-produit ne le fasse entrer dans la lumière. Le quatuor propose ici un death au rythme régulier, avec des riffs assassins et des influences venant des thèmes horrifiques. Nul doute que chaque morceau qui compose cet album se marierait très bien avec n'importe quel film d'horreur de l'âge d'or. Certains seraient tentés de dire qu'on est dans du death très classique mais, ce groupe parvient à dégager quelque chose qui lui permet de créer sa propre identité, aussi bien au niveau des vocaux que des instruments. Un disque chaudement recommandé.
Mortal - As Life Leaves the Body (Indépendant) :
Comme beaucoup de ceux qui ont écouté cet album, je me suis dit que ce groupe était né au début des années 90 et qu'il s'agissait sans doute de la réédition d'un disque paru durant cette période. Que nenni ! Mortal a bel et bien été fondé l'année dernière à San José, Californie. Cette bande de gamins peinturlurés semblent pourtant tout droit venir de cette époque à l'écoute de ce premier opus dantesque qui transpire la vieille école par tous les pores. Du death old school dans les moindres détails, tant musicalement qu'esthétiquement, jusqu'au style pictural de la pochette. Et le meilleur dans tout ça est que c'est sacrément bon et qu'on en redemande, au point qu'on irait se vautrer avec eux dans les cryptes sous la pleine lune. Gros coup de cœur !
Living Gate - Suffer As One (Relapse Records) :
Imaginez des membres de Wiegedood, Amenra et Yob s'associant pour former un groupe de death metal. Et bien c'est possible grâce à Living Gate, supergroupe belge qui nous a pondu en octobre dernier un premier album de derrière les fagots. Attention, l'opus ne s'apprivoise pas facilement. Les compositions possèdent des structures complexes, drôlement alambiquées et particulièrement techniques sur lesquelles la distorsion et la brutalité accouchent d'un mélange donnant un death metal d'une rare sophistication qu'on n'entend pas tous les jours. Autant vous le dire, écouter cet album est une expérience unique en son genre pour tout auditeur appréciant les prises de risques.
Conglaciation - Conglaciation (Liminal Dread Productions) :
À propos de risques, Conglaciation en prend sur son premier album éponyme. Mais, un risque calculé de la part du trio de New-York qui convie à sa table Afterbirth, Spawn of Possession, The Faceless et Blood Incantation pour un résultat prodigieux de death metal progressif, technique et dissonant, travaillé jusqu'à l'os, où la science-fiction rencontre le jazz. Une expérience immersive que vous n'oublierez pas de sitôt.
Sepulchral Whore - The Return from a Sepulchral Rest (Excarnation Records) :
Enfin un premier album pour ce groupe brésilien d'expérience fondé à Recife en 2015 mais, qui demeurait depuis trop longtemps dans les profondeurs obscures de l'underground. La bête est finalement sortie de sa tombe au printemps dernier grâce à ce premier opus très réussi, résolument inscrit dans une veine death old school typiquement sud-américaine, avec son côté malfaisant, ses riffs entraînants, ses vocaux cauchemardesques, sans oublier le son de clavier pour donner un côté encore plus horrifique à l'histoire. Trop classique, diront certains ? Sans doute mais, c'est la vieille école du death qui s'exprime ici dans toute son ignoble majesté.
dimanche 22 décembre 2024
MORTAL RITES - DEATH IN HEAVEN, LIFE IN HELL
Comme à son habitude, le Québec nous envoie régulièrement du lourd avec des groupes de qualité dans la frange du metal extrême. Ici, nous retrouvons Mortal Rites qui livre au monde son premier EP, Death in Heaven, Life in Hell via le label Iron, Blood and Death Corporation. Disons-le sans détour, le quatuor propose six morceaux d'un death old school sans pitié, taillé dans le roc et d'un style classique qui va faire plaisir aux aficionados. La preuve avec le morceau Enslaved que voici.
IMMORTAL FORM - ASHES OF A FALLEN WORLD
Choses promises, choses dues, Immortal Form livre en temps et en heure son premier EP, Ashes of a Fallen World, distribué par le label Hevay and Fast Records. Ce jeune groupe formé cette année à Washington nous offre un death metal frais et authentique au style très direct, impressionnant de puissance et de rigueur dans sa conception. N'hésitez donc pas à vous faire un cadeau de Noël en allant vous procurer l'objet au format cassette directement sur la page Bandcamp du groupe ou écoutez dès à présent ci-dessous le morceau qui ouvre cet EP. Immortal Form est à n'en pas douter une des bonnes surprises de cette fin d'année.
LE COIN DES DÉMOS (22/12/24)
Chaque dimanche, Ravage Cérébral ouvre les portes de l'enfer et s'enfonce dans les bas-fonds les plus insalubres pour y rechercher des groupes récents de death metal tapis dans les profondeurs de l'underground.
Evil Deceiver - Evil Deceiver (2024) :
Première démo de ce projet basé aux États-Unis et qui entretient le mystère autour de lui. Groupe ou création d'une seule personne aux multiples talents ? Quoi qu'il en soit, l'auditeur est entraîné dans un maelström de violence à l'état brut sur ces quatre morceaux prenant leur source dans du blackened death primitif et pestilentiel ne passant pas inaperçu.
Lepra - Mortuus Morgana (2024) :
Une bonne surprise qui nous vient de Suède avec des membres de Black Wound et Atonement au centre de ce projet dont la première démo s'apparente à un curieux croisement entre black metal, crust punk et post-rock. Le résultat de ces expérimentations se laisse écouter sans anicroche grâce à des compositions très inspirées et qui tranchent littéralement avec ce qu'on a l'habitude d'entendre en provenance de ce pays.
Cerebral Rot - Cessation of Life (2018) :
Disparu corps et âme cette année après huit ans d'existence et après que deux de ses membres, Ian Schwab et Clyle Lindstrom aient décidé de monter Putrid Offal, Cerebral Rot était un sacré bon groupe de death metal US dont on retrouvait sur cette démo inaugurale toute la perfidie, la noirceur et la malfaisance qui allaient devenir la marque de fabrique du groupe de Seattle sur ses deux magistraux albums, Odious Descent into Decay (2019) et Excretion of Mortality (2021), tous deux parus chez 20 Buck Spin. Les créatures des bas-fonds les plus nauséabonds étaient à l'œuvre sur cette démo putride et horrifique.
Cemetarian - Tomb of Morbid Stench (2019) :
Du putride et de la pestilence, en veux-tu en voilà sur la seule démo de ce combo texan qui ne vécut que trois ans et dont faisait partie notamment deux membres de Oath of Cruelty, Matt Heffner et Dave Callier (Heffner qui partit ensuite rejoindre Cruciamentum). Sur cette démo puant le mal absolu, trois morceaux de pur death cryptique aux relents de putréfaction sur lesquels l'auditeur percute de plein fouet un monolithe érigé à la gloire des bêtes les plus infâmes et répugnantes des dimensions infernales. Inutile de tourner davantage autour du pot, c'est du death dans toute sa splendeur mortifère.
Fleshmass - Abhorrent Ritual Abuse (2024) :
Terminons avec une entité maléfique tapie dans les bas-fonds de New-York. Guettant dans les ombres sa nouvelle proie, ce combo délivre sur sa troisième démo trois suppliques de blackened death bestial et sanglant qu'une introduction horrifique digne des plus grands films d'épouvante vient agrémenter. Il n'y a ni lumière, ni espoir ici, seulement les incantations barbares d'un monstre déchaînant les enfers sur terre. Du black/death d'excellente qualité qui ravira les amateurs du genre.
samedi 21 décembre 2024
INOCULATED LIFE - DESENSITIZED
Originaire de Denver dans le Colorado, Inoculated Life applique une formule toute simple qui consiste à mélanger du death metal old school de recette suédoise à du grindcore. Une mixture qui prenait déjà bien sur l'album Exist to Decay paru en 2018 chez Redefining Darkness Records et que l'on retrouve sur le nouvel EP du groupe, Desensitized, dont vous pouvez entendre un extrait ci-dessous avec le morceau Born to Die.
PENDULVM - LLANOS DE TUMBAS
Pendulvm est le projet solo d'un artiste chilien qui signe cette année son premier EP, Llanos de Tumbas. Le musicien montre ici un certain potentiel en étant très à l'aise dans le domaine du death/doom. Il signe quatre morceaux inspirés, sombres et lourds, idéalement ancrés dans la tradition du genre et que vous pouvez écouter ci-dessous.
IMPURITY - ANCIENT REMAINS
Le label Hammerheart Records proposera le 7 mars prochain le premier album d'Impurity, The Eternal Sleep. Sans surprise, ce groupe suédois basé à Stockholm fait du death old school tout ce qu'il y a de plus... suédois, très inspiré par Dismember et Entombed, comme vous allez le découvrir sur Ancient Remains, morceau extrait de l'opus à venir.
vendredi 20 décembre 2024
BLUDGER - IN THE ABYSS
Si le death/thrash old school fait partie de vos apports quotidiens en énergie, Bludger devrait logiquement figurer dans votre liste puisque ce groupe australien originaire de Melbourne est en plein dans ce style. Après deux démos datées respectivement de 2020 et 2022, le trio a enchaîné avec un EP, In the Abyss, dont les cinq morceaux peuvent parfois évoquer des sommités telles que Morbid Saint, Possessed, Demolition Hammer ou pourquoi pas le Sepultura des débuts. Vous pourrez vous faire votre propre opinion en écoutant l'intégralité de ce mini-album ci-dessous.
CHRONIQUES DE LA FOSSE : FETID - STEEPING CORPOREAL MESS (2019)
Clyle Lindstrom et Julian Rhea sont deux hommes décidément très occupés. Le premier s'est beaucoup impliqué cette année au sein de Corpus Offal, nouvelle itération de "feu" Cerebral Rot, tout en demeurant le vocaliste de Caustic Wound, groupe de death metal grindcore qu'il monta en 2017 avec trois membres de Mortiferum, Max Bowman, Chase Slaker et Casey Moore. Quant au second, il s'investit toujours autant dans des projets death metal basés à Seattle (là où fut fondé Fetid en 2013 sous le nom de Of Corpse), notamment Cystic et Cryptic Excision, et demeure le batteur de Mortiferum, non sans avoir joué en live pour Sewercide et Hyperdontia. Toutes ces occupations n'ont pas empêché les lascars de sortir un des albums les plus aboutis de l'année 2019, Steeping Corporeal Mess, avec leur entité commune, Fetid, pour laquelle ils ont pu compter sur la bassiste Chelsea Loh, présente depuis le début de l'aventure et qui fit un bref passage chez Witch Vomit en tant que musicienne "live".
Vous l'aurez compris, nous n'avons pas affaire à une bande d'amateurs. D'ailleurs, le très réputé label de Pittsburgh, 20 Buck Spin, avait flairé le bon coup en décidant d'éditer ce premier opus du groupe, après que ce dernier ait dévoilé deux ans plus tôt chez Headsplit Records une prometteuse démo, Sentient Pile of Amorphous Rot, qui avait permis de poser les bases. Si vous avez écouté la dite démo, vous allez retrouver un univers familier sur Steeping Corporeal Mess. En un peu plus de trente minutes, le trio dévoile un death vicié et délétère, aux effluves méphitiques, porté par les vocaux abyssaux d'un Clyle Lindstrom habité par la bête des cavernes. Dès le premier des cinq morceaux, Reeking Within, le groupe nous met tout de suite dans l'ambiance avec son death viscéral, profond, glauque et lugubre, lorgnant avec le doom, oppressant dans les passages lents et terriblement écrasant lorsque le rythme s'accélère. Une impression qui se confirme sur le morceau suivant, Cranial Liquescent, véritable monolithe gore et putrescent que la ligne de basse de Chelsea Loh rend encore plus terrifiant. Les diverses influences du groupe se font sentir au fil de l'écoute. Incantation et Witch Vomit ne sont pas loin sur le pestilentiel Consumed Periphery, et bien sûr Cerebral Rot sur le redoutable et suffocant Dripping Sub-Tepidity, tandis que l'on sent que Mortiferum est passé par là sur Draped in What Was, véritable amplificateur de douleur de plus de huit minutes qui montre l'aisance et la complémentarité du trio de musiciens sur des pièces plus longues, plus complexes et plus tortueuses. On notera enfin, et c'est l'un des autres atouts majeurs de cet album, la très bonne qualité de la production assurée par quelqu'un qui est tout sauf un inconnu, Greg Wilkinson, actuel bassiste du groupe Autopsy avec lequel on sent quelques atomes crochus sur ce disque massif.
Puissant, solide, lourd et ténébreux, Steeping Corporeal Mess est à n'en pas douter une pièce maîtresse du death metal US, typique de l'école américaine avec son rythme écrasant comme un rouleau compresseur et malsain jusque dans les moindres recoins, avec son atmosphère irrespirable et ses riffs implacables. Il est la marque d'un groupe surdoué dont on attend avec impatience le prochain méfait.
IDIOPATHIC - CRYIC PEAKS // HYPERTHERMIC PLAINS
Basé en Californie, Idiopathic avait signé l'année dernière un intriguant premier album, Microcosms, que nous avions évoqué dans cet article. L'entité est de retour ce mois-ci avec deux nouveaux morceaux se situant à peu de choses près dans le même moule, à savoir un death brutal de la vieille école s'aventurant aussi bien vers le doom (surtout sur le second morceau) que vers des contrées plus cosmiques que l'artwork vient ici fort justement souligner. Un bien étrange projet qui conserve sa part de mystère.
jeudi 19 décembre 2024
LE CULTE DE L'UNDERGROUND : RÉÉDITIONS DISINTER ET EXPURGATE
Deux labels indépendants nous font la surprise ce mois-ci de remettre sur le devant de la scène deux groupes, dont un est toujours en activité aujourd'hui. Commençons par Disinter, formation sud-américaine fondée en 1993 à Lima, au Pérou, et qui plus de trente ans plus tard, est toujours active, notamment sous la houlette de son fondateur, la batteur Roberto Leonardi. Ce dernier était déjà de l'aventure lorsque le groupe, dont le lineup était très différent de celui d'aujourd'hui, sortait sa première démo, Laments from the Castle of Sorrow, en 1996. On découvrait alors cinq gamins pratiquant un death primal, lourd et cryptique qui n'était pas sans rappeler les formations scandinaves, en particulier finlandaises, qui sévissaient à l'époque. En 2001, un petit label péruvien, Yawar Inti Productions, éditait au format CD cette démo, ainsi que celle de 1997, Unborn. Plus de vingt ans plus tard, c'est une maison de disques autrement plus renommée, Pest Productions, qui s'est occupée de rééditer la galette. On y retrouve donc dans un beau boîtier CD, agrémenté d'un nouvel artwork, ces deux remarquables démos, soit onze morceaux en tout, premiers témoignages discographiques d'un groupe qui allait ensuite faire une carrière formidable puisque quatre albums sont parus, dont le dernier en date, Guerra Eterna, est sorti en 2022. L'ouvrage est plus qu'une simple compilation. Il est une vraie pièce d'histoire du death metal sud-américain et un bon moyen, par la même occasion, de se familiariser avec ce groupe, pour ceux qui ne le connaîtraient pas, qui du temps de sa jeunesse, possédait déjà une remarquable maîtrise du death traditionnel de la vieille école.
Dans un registre très différent, Expurgate était un groupe fondé à Stockholm par quatre adolescents et dont le travail demeura essentiellement inachevé après que certains membres aient décidé de se tourner vers le black metal en s'investissant dans des projets réputés comme Chalice, Svartsyn ou Unpure. Une démo 5 titres, Forbidden Ruler, eut bien le temps de paraître le 21 avril 1991 avant que le groupe ne raccroche, laissant des morceaux non enregistrés qui auraient dû voir le jour sur une seconde démo qu'on ne verra jamais arriver. Heureusement, par les bonnes grâces de Nomad Snakepit, label néerlandais de Haarlem, un petit miracle va se produire le 19 janvier prochain avec la parution en vinyle de Nynäs Death, une compilation de onze morceaux contenant notamment l'intégralité de la démo Forbidden Ruler (soit trois titres) auxquels il faut ajouter huit autres morceaux, inédits pour le coup, que le groupe avait donc laissé au stade de la composition. Si la qualité sonore n'est pas toujours au rendez-vous (sans doute le côté pièce de musée qui veut ça), on y entend un death extrêmement rugueux, primitif, lorgnant tour à tour vers le thrash ou le doom, dans un registre très old school qui n'est pas usurpé. Étrange curiosité que voilà.
VIDÉO : AVULSED - LACERATE TO DOMINATE
On se demandait si Avulsed n'allait pas finir droit dans le mur après la vague de départs de certains de ses membres émérites cette année. Malgré tout, ce diable de Dave Rotten, désormais seul membre originel rescapé, a tenu le choc en embauchant de nouveaux musiciens, le combo faisant ainsi peau neuve alors que se profile à l'horizon un huitième album studio, Phoenix Cryptobiosis, dont la date de sortie est programmée le 4 mars 2025 via Xtreem Music. Pour bien faire les choses, les madrilènes viennent de dévoiler un clip pour Lacerate to Dominate, morceau extrait de l'opus et sur lequel Avulsed n'oublie pas ses racines depuis que l'aventure a débuté en 1991. Du death puissant et solide, en veux-tu en voilà.
PUTRED - ERA MORBIDITATII
Vous vous souvenez bien entendu de Putred, dont nous parlions dernièrement dans cet article. Le groupe roumain va sortir son nouvel album, Megalit al putrefacției, le 20 janvier prochain chez Memento Mori et puisque nous sommes à un mois de l'événement, rien de tel que d'écouter un nouvel extrait de cet opus avec Era Morbiditatii, morceau solidement ancré dans un death old school dont vous n'échapperez pas à l'odeur pestilentielle et méphitique.
MEPHITIC CORPSE - SCREWGUN MY SPLEEN
Mephitic Corpse est un groupe originaire de Californie qui fait du deathgrind. Après deux démos parues respectivement en 2019 et cette année, le trio va franchir un cap important le mois prochain en dévoilant son premier album, Sickness Attracts Sickness, via les labels Headsplit Records, Extremely Rotten Productions et 625 Thrash. En attendant, le combo nous fait partager un sympathique moment de poésie avec Screwgun My Spleen, premier aperçu du futur opus.
mercredi 18 décembre 2024
CHRONIQUES DE LA FOSSE : SATANIC WARMASTER - EXULTATION OF CRUELTY (2024)
Homme aux multiples projets, Lauri Penttilä, plus connu sous le nom de Werwolf, est aux commandes de Satanic Warmaster depuis plus de vingt-cinq ans. Seul commandant de son navire, à quarante-cinq ans, il est demeuré fidèle à un black metal sincère et sans artifice et l'est toujours aujourd'hui alors que paraît sur le label qu'il a lui-même fondé, Werewolf Records, son septième effort, Exultation of Cruelty. Porté, au début de sa carrière, par des sujets ayant attrait au national-socialisme, l'homme s'est ensuite diversifié en s'intéressant à des thématiques plus classiques comme la guerre, le satanisme, le vampirisme et la lycanthropie, le tout en ne délaissant jamais ce black metal authentique, rugueux et mélodique typiquement scandinave qui a toujours fait sa marque de fabrique. Arrivé bien après la seconde vague de metal noir qui a déferlé depuis la Norvège, pays voisin de sa Finlande natale, il a connu le succès public et l'estime de ses pairs sur des albums majeurs tels que Strength & Honour (2001) et Carelian Satanist Madness (2005) mais, fut aussi critiqué pour son manque d'inspiration sur d'autres disques passables. Si Fimbulwinter lui avait permis de retrouver ses acquis en 2014, Aamongandr, paru il y a deux ans, trahissait un manque d'initiative qui aurait très bien pu entraîner l'artiste vers un point de non retour. Exultation of Cruelty, qui paraît maintenant, allait-il suivre la même pente dangereuse ou permettre à Satanic Warmaster de se réapproprier sa place dans la paysage du black metal ? La réponse à cette question est sans doute marquée par le sceau de l'incertitude.
Satanic Warmaster n'a jamais dévié de sa trajectoire initiale depuis qu'il fut fondé en 1998. S'inscrivant d'abord dans un black brut de décoffrage et primitif (sa toute première démo, Bloody Ritual est un exemple du genre, de même que Strength & Honour), l'artiste a progressivement mis de l'eau dans son vin en rendant son style plus accessible bien que toujours enraciné dans le pur black metal, ce qui dans ce domaine le rapprochait beaucoup de ses illustres compatriotes Sargeist, Horna, Behexen et Goatmoon, sans oublier la légendaire entité venue de l'Illinois, Judas Iscariot, dont on retrouve l'influence très marquée sur A Black Circle of Death, très bon morceau ouvrant ce nouvel album. Qu'entend-on exactement par l'expression rendre plus accessible ? Il suffit tout simplement de suivre l'évolution de l'artiste au fil des ans. Radical et subversif à ses débuts, Satanic Warmaster a doucement opéré une métamorphose qui l'a amené progressivement à inclure plus de parties mélodiques dans ses compositions. Sur Exultation of Cruelty, ces harmonies sont très présentes même si la production a su garder l'aspect rude, glacial et tranchant des premiers enregistrements. À l'écoute, tous les morceaux, huit en tout, se rangent dans cette catégorie, en particulier, les plages sombres et vindicatives que sont I Inhale the Cruelty of Winter's Breath, Harken the Bells of Damnation ou Behold the Infernal Kingdom of Hell. D'un côté, Satanic Warmaster ne perd rien de son authenticité et de son côté guerrier (A Black Circle of Death en témoigne encore) tandis que de l'autre, il rappelle à ceux qui le suivent depuis longtemps et aux non initiés qu'il a mûri et qu'une évolution était nécessaire pour éviter que le gréement ne sombre. C'est là qu'il peut alors s'essayer à des sonorités différentes comme sur l'instrumental Lord of Blood and Darkness (Der Drachenprinz), accalmie bienvenue après la colère non retenue des plages précédentes, avant de conclure sur un très mélancolique et presque désespéré A Dead Rose for a Dying World, plus long morceau de l'album et qui vient ici le conclure sur une note beaucoup plus douce et peut-être aussi plus fataliste.
Cependant, la formule semble avoir ses limites. Sur les huit morceaux, pas un à part l'instrumental n'est inférieur à cinq minutes, la barre des six minutes étant à chaque fois largement franchie et même la barre des dix minutes approchée. Il y a sans doute ici une volonté de la part de l'artiste de laisser le processus créatif s'exprimer dans toute sa plénitude mais, hélas, cette créativité a une fâcheuse tendance à tourner en rond, retombant souvent trop proprement sur ses pattes sans réelle prise de risque. On se lasse ainsi assez vite de As Blood Snarls a Macabre Silhouette, tandis que l'on sombre dans l'ennui à l'écoute de Exhale the Vapor of Starlit Tombs. L'esprit du vieux black des années 90 est toujours là, certes, les braises sont encore ardentes, les voix des anciens se font entendre dans la nuit froide mais, l'esprit s'essouffle, comme une côte érodée par la puissance des vagues. Disons-le clairement, Exultation of Cruelty est loin d'être un mauvais album, bien au contraire. Il contient de bons moments mais, ses fondations sont trop fragiles et son inspiration trop limitée, à quelques exceptions, pour en faire un excellent album de black metal, Satanic Warmaster éprouvant de la peine sur ce disque à trouver un souffle qui semble lui manquer.
LE CULTE DE L'UNDERGROUND : DIX ALBUMS, EP OU DÉMOS ESSENTIELS DE DEATH METAL OLD SCHOOL FINLANDAIS
Quand le death metal déferle de Suède au début des années 90, son voisin, la Finlande, prend la vague de plein fouet. Pourtant, bien des groupes finnois vont rester sur le carreau et ne connaître qu'une courte existence en raison de l'effervescence sur la scène suédoise dont l'évolution et la domination vont aller grandissant de Stockholm à Göteborg. Un constat d'autant plus terrible que la Finlande avait clairement son mot à dire en pratiquant un death beaucoup plus sombre et malsain que la Suède grâce à des groupes au fort potentiel et qui, le temps d'un album, d'un EP ou d'une démo ont su apporter leur pierre à l'édifice. Fort heureusement, certains d'entre eux ne sont pas tombés dans l'oubli, leurs enregistrements ayant su résister aux ravages du temps au point de devenir des références absolues du death metal. Parmi ces pièces majeures passées à la postérité, en voici dix qui constituent un passage obligé pour tout passionné.
Abhorrence - Abhorrence (EP, Seraphic Decay Records, 1991) :
Le groupe fondé à Helsinki en 1989 déployait l'artillerie lourde sur cet EP avec quatre morceaux méphitiques aux guitares aussi affûtées que des couteaux. L'intro horrifique de Caught in a Vortex n'a rien perdu de son efficacité, tandis que Pestilential Mists et Holy Laws of Pain demeurent encore de nos jours de remarquables compositions cryptiques et malfaisantes que l'on peut considérer comme étant parmi les plus grands morceaux composés pour le death metal, n'ayons pas peur de le dire. Du très bel ouvrage, brutal, direct et sans concession.
Demigod - Slumber of Sullen Eyes (album, Drowned Records, 1992) :
Un immense chef-d'œuvre, il faut le dire sans détour, par un groupe qui ne fut sans doute jamais estimé à sa juste valeur. Chaque morceau est bâti sur de solides fondations, taillé dans le roc le plus dur et sans une once de pitié pour l'auditeur. Si le son faisait parfois penser à l'école suédoise, Demigod n'en possédait pas moins une identité qui lui était propre, sombre et malaisante. On trouve notamment sur cet opus un morceau d'anthologie qui n'a toujours pas pris une ride aujourd'hui, le terrifiant et majestueux As I Behold I Despise, dont les intonations et les harmonies provoquent des frissons que l'on peut difficilement réprimer. Un des plus grands albums de death metal des années 90.
Depravity - Remasquerade (EP, Adipocere Records, 1992) :
Beaucoup disent, et ils ont probablement raison, que la pièce maîtresse de Depravity est Silence of the Centuries, EP daté de 1993 et qui fut le dernier acte d'un groupe trop tôt disparu. Néanmoins, il ne faut pas oublier que les finlandais avaient déjà signé une œuvre splendide l'année précédente sous la forme d'un EP 4 titres, Remasquerade, dont le style pouvait évoquer par intermittence Morbid Angel, surtout dans les solos de guitare. La comparaison s'arrêtait néanmoins là, cette galette s'inscrivant dans la plus grande tradition du death finlandais, avec sa rythmique complexe et saccadée, son ambiance glaciale et obscure que rehaussait un clavier maléfique sur des bijoux irrévérencieux tels que The Better Be Descended... ou In Death's Embrace, dont on peut dire qu'il s'agit d'un des plus beaux morceaux composé par ce groupe pétri de talent.
Sentenced - Shadows of the Past (album, Thrash Records, 1991) :
Un bijou au style épuré, aux inoubliables solos de guitare qui donnaient un rendu très mélodique à l'ensemble (splendide morceau d'ouverture, When the Moment of Death Arrives) même si l'ambiance qui régnait sur ce disque était très cryptique. Si l'instrumentation était redoutablement efficace dans tous les compartiments, aussi bien up-tempo que mid-tempo, c'était surtout la voix puissante et régulière du regretté Miika Tenkula (décédé en 2009) qui faisait souvent la différence. Jamais on ne retrouverait par la suite une telle intensité, le groupe décidant plus tard d'abandonner le death metal pour le metal ghotique. Il nous reste heureusement ce disque hors-norme dont bien des formations se sont inspirées par la suite.
Necropsy - Indigestion (démo, 1990) :
Entre 1990 et 1992, Necropsy, fondé à Lahti en 1987, publia pas moins de six démos. La troisième, Indigestion, commençait par une intro instrumentale toute gentillette avant un déferlement de violence. Chacun des huit morceaux était une ode à la décomposition, un reflet putride de l'humanité que le groupe revendiquait en s'essayant à un death particulièrement brutal, gore et fétide où Autopsy et Abhorrence étaient invités à la table des convives. On aurait envie de dire, à l'écoute de cette démo, que le death de Necropsy était tout simplement dénué d'âme et qu'il était livré tel quel, à l'état brut, décharné et désincarné et pourtant, d'une grande créativité pour l'époque. À défaut de venir du cœur, c'était finalement des tripes que sortait ce death.
Funebre - Children of the Scorn (album, Spinefarm Records, 1991) :
Tout a déjà été dit sur cet album de génie. Alors, ne tournons autour du pot : c'est l'un des plus grands albums de death metal des années 90, tout simplement, par l'un des tous premiers groupes finlandais à avoir percé, bien qu'il ne vécut que trois petites années et bien que cet opus soit le seul qu'il ait enregistré. Et quel opus ! Pas d'artifice, pas de fioriture, pas d'agrément, c'était une mise à nu sur chaque morceau, avec des vocaux à vous filer la chair de poule, une batterie martelant sans cesse comme si le batteur mettait à chaque fois sa vie en jeu, des guitares stridentes, hurlant à la mort, dans un style agressif, une ambiance pesante, suffocante et délétère, presque toxique. Chacun des dix titres qui composent cet album est à mettre au panthéon du death.
Purtenance - Member of Immortal Damnation (album, Drowned Records, 1992) :
Sans surprise, la noirceur est omniprésente sur le premier opus des finnois. Mais alors, qu'est-ce qui en fait un disque à part et une œuvre majeure du death scandinave ? Sans doute ses passages lourds, glaçants comme l'hiver du grand nord, à moins que les mélodies, telles des sentiers tortueux, aient exercé sur nous une sorte de transe hypnotique et que des fantômes d'un autre âge soient venus hanter nos nuits et envahir notre esprit. Le malaise que l'on ressent est encore plus prégnant sur les incontestables réussites que sont les morceaux In the Misty Morning ou Reality Isn't Disappeared. On pardonnera du coup la qualité plus que douteuse de la production tant l'ambiance du death à la la finlandaise est ici parfaitement restituée.
Interment - Life Here After (EP, ComeBack, 1991) :
Quand Samppa Haapio quitte Funebre en 1990, il décide de se consacrer pleinement à son autre projet, Interment. C'est sur un EP 3 titres paru en octobre 1991 sur le petit label ComeBack, basé à Turku, que le groupe dévoile tout son potentiel. Portés par un chant d'outre-tombe qui effraierait même les plus téméraires, les morceaux révèlent des rythmiques très nerveuses et oppressantes sur lesquelles la guitare sait s'exprimer clairement sans noyer les vocalises très basses de Samppa. Il en résulte un EP très noir et très macabre, agrémenté de cette sauce finlandaise reconnaissable et donnant un goût très prononcé. Voici un groupe qui aurait sans doute pu avoir plus de reconnaissance s'il avait duré longtemps.
Convulse - World Without Gods (album, Thrash Records, 1991) :
Un cuirassé paré pour toutes les tempêtes. Voilà ce qu'était Convulse au début des année 90 avant qu'il ne vire salement vers le death 'n' roll vers le milieu de sa carrière puis finalement, le death/prog. Le 13 septembre 1991, le combo balance un brûlot à la face du monde sous la forme de ce premier album contenant dix morceaux d'un death intransigeant, rugueux et vindicatif, qui va puiser son inspiration aussi bien chez d'autres formations finnoises comme Purtenance, Funebre ou Demigod, que chez les suédois de Dismember ou les britanniques de Bolt Thrower (sans doute pour y trouver une ambiance guerrière que l'on ressent bien sur ce disque). Le côté glauque des compositions, la lourdeur et les distorsions passagères font le reste pour faire accoucher ce groupe d'un grand disque de death metal.
Putrid - God Forsaken (EP, After World Records, 1992) :
On embarque ici dans un trip différent avec un groupe qui aimait beaucoup faire du death aux sonorités doomy. Sur le seul EP de leur carrière (sous le nom de Putrid, avant qu'ils ne changent pour God Forsaken), les quatre finlandais nous livraient un death bien lourd, lent et très typé, les guitares accordées bas pour justement renforcer l'impression de lourdeur et de malfaisance. Du death bien baveux qui laisse volontairement son gras dépasser du bide avec une bonne dose d'insolence.
EMISSARY - ETERNITY BOUND
Né à Barcelone, Emissary a bien l'intention de ne pas laisser la flamme du vieux death/thrash s'éteindre sur son premier album, Eldritch, à paraître le 1er mars de l'année prochaine sur le label Fetzner Death Records. Le combo catalan montre à quel point il peut être old school et bien calé dans les années 80 sur Eternity Bound, premier morceau enjoué extrait du futur opus.
dimanche 15 décembre 2024
LE COIN DES DÉMOS (15/12/24)
Chaque dimanche, Ravage Cérébral ouvre les portes de l'enfer et s'enfonce dans les bas-fonds les plus insalubres pour y rechercher des groupes récents de death metal tapis dans les profondeurs de l'underground.
Impious Consecration - Impious Consecration (2024) :
Nous sommes ici avec un groupe chilien nouvellement arrivé sur la scène du metal extrême et qui pratique un très bon blackened death metal sombre et lourd, avec un chant caverneux offrant un rendu particulièrement méphitique sur les deux morceaux proposés ici. Vos pires cauchemars pourraient prendre forme à l'écoute de cette démo monolithique et pestilentielle.
Battle Cattle - 2024 Demo (2024) :
Ce projet américain basé à Portland dans l'Oregon livre sept morceaux (dont une reprise du groupe Lich King) de death/thrash très classique. Tout dans la musicalité, aussi bien le chant que les instruments, est porté vers le son caractéristique de la vieille école du style. Rien de surprenant donc, même si l'on sent que le combo (qui serait visiblement le projet d'une seule personne) prend avant tout du plaisir sur cette petite démo sans prétention.
Grave Infestation - Infesticide (2019) :
Il s'agit de la toute première démo du groupe canadien né en 2018 à Vancouver et dont certains membres officient chez Ceremonial Bloodbath et Encoffinate. L'on sent d'ailleurs sur ces cinq morceaux putrides les influences black/death de Ceremonial Bloodbath bien que le style soit parfois tourné vers le death/doom. L'expérience d'écoute est quoi qu'il soit traumatisante tant cette démo dégage de noirceur et de malfaisance à tous les niveaux.
Encoffinate - Cimmerian Corpse Dungeon (Caligari Records, 2019) :
Fort logiquement, et comme évoqué ci-dessus, on retrouve chez Encoffinate des influences venant de Grave Infestation puisqu'il existe des atomes crochus entre les deux formations canadiennes. Le death, le black et le doom s'entrecroisent pour former quatre morceaux massifs baignant dans un ambiance glauque et lugubre. La différence par rapport à Grave Infestation vient du chant, parfois moins caverneux, plus clair et qui n'est pas sans rappeler, par intermittence, le Entombed des débuts. Un très bonne démo qui est pour le moment le seul témoignage discographique de cette formation qui semble avoir été mise de côté.
Necromantic Worship - Promo 2025 (2024) :
Une bonne surprise qui nous vient de Maastricht, aux Pays-Bas, avec ici quatre morceaux d'un black metal épuré et sincère, dont certains vont figurer sur le futur premier album de cette formation, à paraître l'année prochaine. Into the Haunted Crypt est une composition hantée et captivante qui nous ramène au temps des Légions Noires, tandis que l'on se laisse porter sans offrir la moindre résistance sur l'instrumental Walpurgisnacht dans un style se rapprochant du dungeon/synth. Cthulhu Fhtagn vient ensuite conclure cette démo en délivrant de sublimes harmoniques, notamment dans le chorus, pour un hommage appuyé à Lovecraft, au Nécronomicon et au mythe de Chtulhu. Je ne m'attendais pas à cela, notamment de la part d'un groupe venant d'un pays où la scène black metal n'est pas forcément la plus représentée.
LE CULTE DE L'UNDERGROUND : METAL FORCES PRESENTS... DEMOLITION - SCREAM YOUR BRAINS OUT
En 1983, un éditeur britannique du nom de Bernard Doe fonde à Stevenage, en Angleterre, un magazine musical qui va très vite devenir une référence en la matière, Metal Forces. Si l'aventure dura un peu moins de dix ans, elle aura permis néanmoins à de nombreux groupes de l'époque de s'assurer une bonne promotion en Europe dans des domaines comme le heavy metal, le hard rock et le rock alternatif. Au début des années 90, le magazine tenta une ouverture salutaire vers des sonorités plus extrêmes en donnant naissance à Thrash 'n Burn, une publication parallèle au rythme mensuel (alors que Metal Forces était hebdomadaire) s'intéressant aux formations de metal extrême. Dans le même temps, Metal Forces s'était rendu populaire auprès des fans de death metal et de thrash metal en publiant régulièrement dans ses pages une colonne intitulée Demolition qui se penchait justement sur tous les groupes, connus et moins connus, de la scène extreme metal. Il en découla notamment une compilation appelée Metal Forces Presents: Demolition - Scream Your Brains Out, parue en 1988 au format vinyle sur le label Chain Reaction Records et pas facile à trouver de nos jours à moins de s'en donner la peine.
À l'époque, cinq groupes s'étaient associés sur cette compilation en proposant chacun deux morceaux. On y trouvait Aftermath, le groupe de thrash technique et progressif de Chicago, toujours en activité aujourd'hui après sa reformation il y a dix ans. Dans le même registre, Anacrusis, le combo de Saint-Louis, Missouri, figurait aussi sur ce disque, ainsi que le légendaire groupe thrash Atrophy, de Tucson, qui a sorti son troisième album studio cette année, plus de trente ans après le précédent. Enfin, au rayon des curiosités, la compilation était agrémentée par la présence de Hobbs' Angel of Death, mythique formation australienne du charismatique Peter Hobbs, hélas décédé en 2019, alors qu'un certain Chris Barnes (qui allait intégrer Cannibal Corpse) se montrait avec sa formation thrash/speed Leviathan.
Cette compilation constitue un trésor musical qui n'a rien perdu de sa valeur et de son authenticité aujourd'hui car, elle s'inscrivait alors dans une époque de changement (1988, on le rappelle) durant laquelle le thrash metal popularisé quelques années plus tôt opérait une mutation importante amenant à des ramifications allant notamment vers le death. Un groupe comme Leviathan par exemple, qui proposait ici deux morceaux issus de sa démo cultissime Legions of the Undead sortie en 1987, était l'exact reflet de ces changements majeurs avec son thrash ultra violent lorgnant résolument vers des sonorités apparentées à ce que l'on pouvait considérer comme les prémices du death metal aux États-Unis. Mais, cette compilation allait plus loin encore puisqu'elle était aussi un reflet très sincère des différentes facettes du thrash de l'époque et qu'elle montrait à quel point les groupes représentés pouvaient faire preuve d'une grande créativité. Ainsi, le thrash brut de décoffrage de Leviathan venait se télescoper avec les compositions plus techniques et progressives d'Anacrusis, groupe cruellement mésestimé qui a vraiment apporté quelque chose de novateur au genre, alors que chez Hobbs' Angel of Death, c'est avant tout la passion et la personnalité flamboyante de sa figure de proue, Peter Hobbs, qui l'emportait sur des thématiques plus classiques comme le sexe, la violence et le satanisme. C'est ce qui fait sans aucun doute de cet album collaboratif une pièce unique en son genre, un morceau à part entière de l'histoire du metal extrême en général et du thrash metal en particulier. Bref, un objet indispensable.
SACRIFICE - ANTIDOTE OF POISON
Rappel important aux populations : Sacrifice va sortir son nouvel album, Volume Six, le 21 février prochain chez Cursed Blessings Records et High Roller Records, comme nous le précisions déjà dans la rubrique Le Culte de l'Underground. L'événement est majeur puisque le précédent effort de la légende vivante du thrash metal datait seize ans, avec The Ones I Condemn en 2009. Articulé autour de son lineup d'origine, Sacrifice propose aujourd'hui un avant-goût de ce sixième chapitre avec Antidote of Poison, morceau survitaminé aux éblouissants solos qui nous ramène plus de trente ans dans le passé.